L’histoire des châteaux Japonais

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L’histoire des châteaux Japonais

Pour bien comprendre les châteaux japonais, il faut se plonger dans l’histoire du pays. Le Japon malgré une culture très différente a, comme le vieux continent, aussi connu une époque médiévale. Les différentes régions étaient alors divisées en petites entités sur lesquelles régnait un seigneur local, le daimyo. L’équivalence serait des Ducs ou des Comtes. L’empereur, d’ascendance divine, pouvait lui être vu comme le Pape alors que le Shogun était lui en charge de faire régner le pouvoir de l’empereur.

Ce système féodal imposait alors d’avoir des places fortes, mais ce n’est qu’avec l’unification du pays que les vrais châteaux forts furent érigés, et cela dans le laps de temps très court de quelques dizaines d’années, à la fin du XVIe siècle. Un apogée très rapide avec une stabilisation sur plusieurs dizaines d’années pour finalement être presque tous détruits avant de se relever au XXe siècle.

Des châteaux au Japon, introduction

Les châteaux japonais sont très différents de nos châteaux. En France, les châteaux-forts étaient construit en pierre et avait pour vocation de pouvoir tenir lors d’un siège. 

Au Japon, les batailles étaient différentes et il y eu peu de châteaux assiégés. Autre point fondamentale était l’usage de la poudre. Elle est devenue concrète au Japon avec l’arrivée des portugais au XVIe siècle. Il y avait bien eu auparavant de la poudre chinoise mais l’usage sur les champs de bataille étaient quasiment inexistant.  Ainsi quand deux clans s’affrontaient, cela se passait sur un champ de bataille non loin du château d’un des deux clans.

Le château est alors considéré comme l’endroit de repli et de dernier recours. C’est ainsi que le donjon, bâtiment le plus haut d’un château, n’était quasiment pas habité. Les bâtiments du château étaient construits en bois à l’intérieur. Très souvent, le bois utilisé est du cyprès de la région de Yoshino. La durée de vie estimée de ces bois est de 250 ans.

Les murs, de couleurs blanche, sont appelés Takekomai. C’est un coffrage avec un treillis en bambou japonais traditionnel, solidifié avec de la paille et remplis d’argile. Une couche d’enduit est alors ajouté de chaque coté du mur. Leurs épaisseurs varie entre 21 et 24 cm.

Avant le XIIe siècle

Deux clans s’opposèrent pour la prise de pouvoir pendant l’ère Heian (794-1185) : Les Minamoto et les Taira. Entre 1180 et 1185, le Japon traversa une grande guerre civile avec au final la victoire des Minamoto. Durant cette période, le pouvoir de l’empereur était encore fort. On ne parlait pas encore de châteaux mais plutôt de forteresses.

1185 – 1333 : la période Kamakura : Le début de la féodalité japonaise

Le Japon entra alors dans sa phase féodale. L’empereur ne jouait plus qu’un rôle passif dans la gestion du pays. Il était présent essentiellement pour les cérémonies. Les fonctions civiles et militaires étaient aux mains des samouraïs. Le plus puissant de ces samouraïs étant le shogun. C’était le premier gouvernement militaire, appelé Bakufu.

Jusqu’à la fin du XIVe siècle, les châteaux consistaient en de simples fortifications construites en bois, parfois protégé par une douve. Ces constructions étaient surtout faites pour se protéger des invasions barbares. Il s’agissait de places défensives, souvent provisoires. Il ne reste que très peu de châteaux de cette époque et quelques rares pièces comme le château de Kino-jo vers Okayama permettent de se rendre compte de l’architecture utilisée à l’époque. 

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Kino-Jo

1467 – 1573 : la guerre des provinces ‘Sengoku’

Durant la guerre des provinces, de nombreux châteaux furent construits. Ils étaient alors appelés yamajiro (山城). C’étaient surtout des châteaux stratégiques destinés pour la guerre et ne disposaient pas tous de douve, de tour de garde et d’une tour principale, le donjon, appelées Tenshu.

Ils étaient situés en haut des collines ou dans les montagnes. Leur but est de surveiller le territoire et les voies commerciale. La tour principale était souvent composée d’un balcon filant permettant l’observation. Les châteaux les plus connus sont Gifu, Inuyama ou bien les ruines de Takeda.

Château de Gifu et son balcon filant
Château de Gifu et son balcon filant
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Château de Inuyama, construit en 1537

1573-1603 : Le vrai début des châteaux forts Japonais

La fin de la guerre des provinces est proche, notamment grâce à Oda Nobunaga qui est le premier grand réconciliateur du Japon. C’est la transition vers un nouveau shogunat. Oda Nobunaga chasse les derniers petits seigneurs et apparaissent les Daimyo, grand seigneur d’une province. L’éparpillement des pouvoirs militaires et politiques disparait, et cela grâce à une chasse aux ligues militaires et autres clans qui prêchent la guerre. Une nouvelle économie est mise en place et les Portugais débarquent au Japon avec une nouvelle technologie : les arquebuses et les canons.

C’est Oda Nobunaga qui profite le premier de l’usage de la poudre sur les champs de batailles et réussit ainsi à stabiliser le pays. Le successeur d’Oda Nobunaga, Toyotomi Hideyoshi qui était un des lieutenants d’Oda, continua l’unification du pays avec comme grand rival le clan Tokugawa. Hideyoshi régnait sur l’ouest du Japon alors que Tokugawa possédait l’est.

C’est la bataille de Sekigahara en 1600 qui scella le sort du Japon. Cette grande bataille de l’histoire japonaise est une confrontation entre les armées de l’ouest de Toyotomi et les armées de l’est de Tokugawa. Tokugawa en sort victorieux après qu’un des daimyo en faveur de Toyotomi trahisse ce dernier et rejoignît l’armée de Tokugawa.

Changement radical dans la construction des châteaux. De nouveaux types sont construits, les hirayamajiro (平山城). Ces châteaux étaient construits sur de petits promontoires en hauteur afin de garder un côté stratégique. Ce dernier était souvent conçu avec la terre prise pour creuser les douves où bien il s’agissait d’une petite colline naturelle, comme c’est le cas pour le château d’Himeji. 

Ces châteaux avaient des fortifications très poussées et les chemins d’accès très tortueux afin de perdre l’ennemi dans le dédale des murs d’enceinte. Ces châteaux ayant des systèmes de défense évolués étaient construits pour donner une image de puissance et l’élément principal était le donjon. Ce dernier, véritable emblème du château n’était pas conçu comme un endroit de vie. Dernier bastion du château en cas d’attaque, l’intérieur était très dépouillé.  

Dernière étage du donjon de Matsue
Dernière étage du donjon de Matsue
La tour (Yagura) la plus ancienne du Japon au château de Kumamoto
La tour (Yagura) la plus ancienne du Japon au château de Kumamoto

Le premier de ces châteaux fut celui d’Azuchi construit par Oda Nobunaga en 1579. Ce château, détruit par le feu 3 ans après sa construction, fut le dernier endroit d’Oda Nobunaga qui se fit seppuku après avoir été trahit par un de ses vassals. Le château d’Azuchi a été un des rares châteaux à posséder un donjon habitable. L’architecture des autres châteaux étaient calquées sur une dernière enceinte abritant le donjon et les bâtiments pour recevoir et donner les audiences du daimyo à ses vassaux. Il s’agit de l’Honmaru. La deuxième enceinte était celle de la résidence du seigneur. Peu de gens pouvait y accéder. Il s’agit du Ninomaru. Enfin une troisième enceinte abritait les baraquements pour la protection du seigneur et était le lieu d’habitation des samouraïs. Il s’agit du Sanmaru. Suivant la spécificité des châteaux, il pouvait y avoir d’autres enceintes jouant des rôles particuliers.

Ces châteaux annonçaient un nouveau type et une nouvelle ère dans l’histoire japonaise, celle de la stratégie politique et économique qui outrepasse celle de la guerre entre clans.

Les plus beaux châteaux de colline sont Kumamoto, Himeji, Matsue…

Château de Matsue
Château de Matsue

1603-1615 : L’âge d’or des châteaux

Les années de gloire des châteaux japonais. Malgré l’équilibre fragile entre Toyotomi et Tokugawa, c’est ce dernier qui prend le shogunat. Le Japon est unifié. Cependant, ce fragile équilibre entraîne le boom de la construction des châteaux comme lieu de pouvoir.

Les châteaux étaient de plus en plus complexes et grands. On appelait ces châteaux les hirajiro (平城), les châteaux de plaines. Ils étaient essentiellement construits dans le but d’assoir une situation politique et économique plutôt que défensive.

Malgré tout, ces châteaux disposaient de moyens de défense très sophistiqués. Ils étaient construits au centre des villes afin d’avoir la main mise sur le peuple entourant le château. Le château était alors synonyme de puissance. De plus, toute l’économie se développa autour d’eux. Par comparaison aux châteaux occidentaux, la superficie d’un château japonais était bien plus grande et le système d’enceinte s’étendait sur plusieurs hectares.

Le Japon comptait plus de 1 000 châteaux au début du XVIe siècle. Les principaux châteaux que l’on peut visiter aujourd’hui ont historiquement été construits entre 1590 et 1615. A ce jour, il n’existe que 12 châteaux ayant un donjon original en bois, c’est à dire qu’au fil des siècles, la structure originale du château a été conservée. 

Les plus beaux châteaux de plaine sont Matsumoto, Nagoya…

Le château de Matsumoto, jamais attaqué, construit début 1590 et finit en 1614
Le château de Matsumoto, jamais attaqué, construit début 1590 et finit en 1614

1615 – milieu XIXe : La stabilité des châteaux

1615 sonne le glas de la construction des châteaux avec la loi de Tokugawa : « Un château, une province ».

L’augmentation de la construction de châteaux de plus en plus impressionnants obligea alors le shogun Tokugawa Ieyasu à rédiger une loi (ikkoku ichijo) qui interdisait à un daimyo d’avoir plus d’un château par province et que seul le château où résidait ce dernier devait être conservé. 

Cela provoqua la destruction de nombreux châteaux et par réciprocité la construction de château n’ayant pas de réel intérêt stratégique. Après cette loi, il ne resta plus que 170 châteaux.

Cette loi permit au clan Tokugawa de conserver le pouvoir et d’éviter tout engrenage dans de nouveaux conflits. La dernière grande bataille fut celle d’Osaka. Le château fut assiégé en 1615 par Tokugawa et la victoire de Tokugawa sonna la fin du clan Toyotomi.

Après 1615, de nombreux édifices furent démantelés. Durant les 250 ans de pouvoir du clan Tokugawa, il fallait demander une autorisation au shogunat afin de procéder à des travaux. Les besoins de guerre étant beaucoup moins importants après 1615, les châteaux devinrent des places d’administrations et de pouvoirs. Le donjon (tenshu) devint plus luxueux. Au fil du temps, la restriction de reconstruction s’allégea et quelques donjons furent reconstruits. Ce fut le cas pour Bitchu Matsuyama, Kochi, Uwajima, Hirosaki, Bitchu Matsuyama, Wakayma et Fukuyama.

N’oublions pas aussi les catastrophes naturelles (tremblement de terre et incendie) qui détruisirent beaucoup de châteaux comme celui d’Edo, ancien nom de la ville de Tokyo,  en 1657. Ce dernier ne fut jamais reconstruit.

Le château de Kochi
Le château de Kochi

Milieu XIXè – Début ère Meiji 1868 : La fin du shogunat

Les pressions étrangères et les règles trop strictes du shogunat engagèrent le pays dans une courte reconstruction de places fortes comme peut en témoigner le château de Goryökaku sur l’île d’Hokkaido. Dessiné selon une architecture européenne, elle devait prendre en compte les nouvelles formes de guerres avec l’utilisation massive des armes à feu. Ce ne fut pas un succès, car les constructeurs ne savaient pas faire ce type d’architecture. Le shogunat s’effondra par la suite pour laisser la place à un gouvernement dirigé par l’empereur.

La dernière grande bataille où un château japonais s’illustra fut lors de l’insurrection des samouraïs du clan Satsuma en 1877. Les insurgés voulurent prendre contrôle du château de Kumamoto où résidait les forces armées de l’empire. Le château de Kumamoto résista au siège des samouraïs et contre toute surprise, l’armée gagna le combat. Cette défaite brisa l’élan de rébellion des samouraïs et ce fut la fin de cette caste guerrière avec le seppuku de Takamori Saigö, le dernier samouraï.

Château de Kumamoto
Château de Kumamoto

1868 – 1912 : La disparition des châteaux avec l’ère Meiji (1868)

Afin de faire table rase du passée, le gouvernement décida d’établir une loi en 1871 qui promulgua la destruction de tous les châteaux existants. Les archives montrent qu’en 1869, il existait encore 186 châteaux.

Depuis 1926  : La reconstruction et la rénovation pour la fierté japonaise

Après les destructions massives de l’ère Meiji, il ne restait plus que 19 châteaux ayant leurs donjons originaux. Un élan de fierté nationale alla engendrer de nombreuses réparations et reconstruction de châteaux. C’est ainsi qu’en 1930, le château d’Osaka fut reconstruit. Malheureusement, les catastrophes naturelles ou les bombardements de la Seconde Guerre mondiale eurent raison de 7 donjons et il ne reste à ce jour que 12 châteaux ayant un donjon orignal. Cependant, une forte pression nationaliste dans les années 60 eut pour effet la reconstruction des 7 tours ayant été détruites. La reconstruction ne s’arrêta pas là et de nombreux autres châteaux furent reconstruit. A ce jour, le Japon compte environ 252 structures de châteaux existantes dont 88 donjons, 66 portes et 82 murs d’enceinte. De nombreux châteaux ont été reconstruits par rapport à un type d’architecture et non forcément par rapport à l’original. Ces châteaux accueillent souvent un musée et ont tous, bien sur, un parc avec des cerisiers d’ornements, les sakura. En 2006, une liste des 100 plus belles structures de châteaux a été publiée.

Le château de Uwajima
Le château de Uwajima

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